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La mise en société de l'entreprise individuelle

 

Organiser la transmission d’une entreprise individuelle n’est pas chose aisée, qu’elle se fasse au profit d’un tiers ou en vertu d’une transmission familiale.

Apporter l’entreprise individuelle à une société peut être extrêmement utile tant sur le plan pratique qu’au niveau fiscal. Juridiquement, la société sera beaucoup plus adaptée à une transmission progressive de l’entreprise. Les statuts sociaux permettront d’établir les règles de gestion et les pouvoirs de chaque associé. L’entrepreneur pourra ainsi conserver une majorité et des revenus, tout en vendant progressivement les titres en un ou en plusieurs blocs.

Fiscalement, la mise en société d’une entreprise individuelle peut, dans certains cas, faciliter une transmission en Dutreil ou réduire le coût fiscal d’une cession à titre onéreux ultérieure.

La cession à titre onéreux de l'entreprise individuelle


L’intérêt fiscal de l’apport de l’E.I en société, au titre de l’impôt sur le revenu

                  La cession à titre onéreux du fonds de commerce (i.e matériels, droit au bail, clientèle…) entraine l’imposition immédiate des bénéfices non encore imposés et de l’ensemble des plus-values professionnelles (PV à long terme à hauteur de 16%, et PV à court terme au taux marginal de l’impôt sur le revenu).

Dans cette situation, le chef d’entreprise subit une imposition pouvant atteindre les 45% (hors prélèvements sociaux) suivant sa situation personnelle.

Apporter l’entreprise individuelle à une société nouvellement créée à cet effet permet à l’exploitant de transférer à cette dernière l’imposition des plus-values à court terme dégagées par l’apport des éléments amortissables (CGI, art 151 octies).

La société nouvelle, qui devra opter à l’impôt sur les sociétés, supportera une imposition au taux de 33,33% (éventuellement 15% pour une fraction des bénéfices) répartie sur cinq exercices.

En contrepartie, la société bénéficiaire de l’apport pourra amortir le bien sur sa nouvelle valeur (ce qui permet ainsi d’une certaine façon, une réévaluation « libre » des actifs). La société retrouvera ainsi une capacité d’amortissement supérieure à celle dont pourrait bénéficier l’entreprise individuelle en fin de cycle (VNC proche de 0).

Les plus-values à long terme dégagées par l’apport subiront une imposition de 33,33% à moins que l’apporteur n’opte pour une imposition immédiate au taux réduit de 16%.

A ce titre, plusieurs régimes d’exonération peuvent trouver à s’appliquer si les conditions sont remplies.

Concernant les plus-values sur les éléments non amortissables (notamment la clientèle), elles seront reportées et ne subiront pas d’imposition immédiate. Cette plus-value deviendra imposable au jour de la cession des droits sociaux reçus en contrepartie de l’apport.

Ainsi, suivant la situation personnelle du chef d’entreprise, l’apport en société de son entreprise individuelle lui permettra de faire une économie d’impôt non négligeable.

L’intérêt au titre des droits d’enregistrement

                  La cession de l’entreprise individuelle met à la charge des acquéreurs, des droits d’enregistrement au taux de 3% sur la faction comprise entre 23 000 € et 200 000 €, et de 5% sur la fraction excédant 200 000 €.

A titre d’exemple, pour un fonds de commerce évalué à 350 000 €, sa cession entrainerait des droits à hauteur de 19 810 €.

La mise en société du fonds de l’entreprise individuelle n’entraine aucun coût fiscal dès lors que l’apporteur s’engage à conserver les titres reçus en contrepartie de l’apport pendant 3 ans (CGI, art 809 I, bis). Seul un droit fixe de 375 € ou 500 € si le capital social à l’issue de l’opération d’apport est supérieur à 225 000 €. Toutefois, dans le cadre d’une « constitution » de société, l’apporteur pourra bénéficier d’une exonération de droits fixe (CGI, art 810 bis).

Une fois l’apport réalisé, la cession ultérieure ne portera donc plus sur le fonds de commerce (taux de 3% à 5%) mais sur les parts sociales (dans le cadre d’une SARL), ou sur des actions (en cas d’apport en SAS).

La cession de titres de société est moins onéreuse qu’une cession de fonds de commerce.

S’il s’agit d’une SARL, les parts sociales seront soumises aux droits d’enregistrement au taux de 3% pour la fraction au dessus de 23 000 €.

S’il s’agit d’une société par actions (SAS) les droits d’enregistrement sont de 0,01%.

Pour reprendre l’exemple précité, l’apport en société constituerait un atout pour le chef d’entreprise quant aux négociations du prix avec le cessionnaire qui verrait ses frais passés de 19 810 € à 35 €.

L’intérêt juridique de la mise en société

                  Coté juridique, la mise en place d’une structure sociale permettra de réorganiser les pouvoirs en présence de plusieurs « exploitants » (salariés importants, conjoint, enfants…).

Comme dans toute association ou collaboration, il n’est pas toujours évident de concilier les objectifs de tous. Une structure sociale permettra par exemple de conforter les objectifs du cédant, qui souhaiterait céder sa participation pour profiter de sa retraite, tout en permettant à l’un de ses collaborateurs d’intégrer le projet de cession de l’entreprise qu’il a lui-même contribué à développer. 

Départ à la retraite

            Comme dans tout projet de reprise, la principale préoccupation des parties sera le « prix ». D’un coté, le cédant, qui a dans la plupart des cas réussi à fidéliser une clientèle, un produit, un concept, aura tendance à surévaluer la valeur du fonds. De l’autre coté, le repreneur, cessionnaire, aura quant à lui tendance à minimiser la valeur du fonds pour rentrer dans son plan de financement, et assurer une rentabilité le plus rapidement possible.

Dans le cadre d’une société, lorsque des difficultés ente les parties interviennent quant à la fixation du prix, ces derniers peuvent convenir qu’une partie des titres (ex 5%) seront conservés par le « futur » retraité en usufruit. Seule la nue-propriété est cédée sur cette fraction de titres. Cette alternative aura pour effet de diminuer le prix de cession tout en assurant au cédant un complément de retraite (qui sera proportionnel au résultat de l’entreprise cédée).

Au décès de l’usufruitier, la pleine propriété sera reconstituée sur la tête du nu-propriétaire (cessionnaire) en franchise d’impôt.

Une rédaction adaptée des statuts permettra de prévoir les modalités de versement du dividende, mais également d’organiser les pouvoirs entre nu-propriétaire et usufruitier.

Favoriser une reprise familiale

La transmission de l’entreprise individuelle

                  La donation de l’entreprise individuelle entraine les mêmes conséquences sur le plan fiscal qu’une cession à titre onéreux (taxation immédiate des bénéfices et des plus-values latentes).

Toutefois, un dispositif de faveur permet de demander le report d’imposition des plus-values au moment de la donation de l’entreprise (CGI, art 41). Ce report sera conservé jusqu’à la date de cession de l’entreprise par le donataire, ou de la cession de l’un des éléments d’actifs (ce qui peut être un frein au renouvellement des actifs et au développement de l’entreprise).

Le report d’imposition sera par ailleurs transformé en exonération totale si l’activité est poursuivie pendant au moins cinq ans par l’un des bénéficiaires de la transmission.

L’apport en société suivi de la donation des titres

                  Lorsque le donateur opte pour une mise en société préalablement à la donation, le même dispositif de faveur (CGI, art 151 octies) peut être utilisé.

Cette stratégie permettra notamment de faciliter la mise en place d’un engagement collectif de conservation dans le cadre d’une transmission placée sous le dispositif Dutreil, qui peut s’avérer délicat dans certains  cas pour une entreprise individuelle.

Toutefois, lorsque les plus-values sur éléments non amortissables sont potentiellement élevées, la solution consistant à faire d’abord donation de l’entreprise individuelle, en laissant aux donataires le soin de constituer une société, peut être plus avantageuse puisque les bénéficiaires peuvent échapper à toute imposition sur les plus-values au bout de 5 ans, y compris sur les éléments non amortissables en application de l’article 41 du CGI.

Le choix s’effectuera principalement en fonction de la valeur du fonds de commerce, du montant des plus-values imposables, et d’autre part, des abattements disponibles pour les donataires.

Pour rappel, les enfants bénéficient d’un abattement en ligne directe de 100 000 € par enfant et par parent. Des régimes de faveur sont également applicables en cas de donation au profit d’un salarié.

Auteur : Thomas RIGAL

Service droit des affaires

 

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